Les habitudes ont la tête dure pour les hommes; je le remarque régulièrement lorsque je discute santé avec mon père. Même lorsque ma mère et moi faisons équipe, il trouve toujours des raisons pour ne pas consulter. Et au final, lorsque que nous avons réussi à étaler tous les arguments logiques, raisonnables et convaincants, même lorsqu’il avoue que nous avons raison et admet qu’il devrait consulter, au bout du compte il fait la sourde oreille.
Car c’est bien de cela dont je parle, au sens propre comme au sens figuré : Mon père a perdu de ses facultés auditives au fil des années. Nous le remarquons tous et il en est bien conscient lui-même. Ce n’est pas récent, mais la réticence est persistante.
Bien sûr, il a consulté pour d’autres problèmes de santé et blessures au fil des ans. Il n’est pas complètement fermé à l’idée d’aller voir son médecin ou d’aller à l’urgence. Mais disons que lorsqu’il n’a pas le choix, il y va à reculons et je suis certain que ma mère a son rôle à jouer.
Mon père est de la génération des « baby boomers ». Son monde, c’était la campagne et la forêt, près d’un petit village plutôt isolé. À cette époque, notre système de santé universel tel qu’on le connaît n’existait pas. Il fallait payer le médecin, et mes grands-parents n’étaient pas riches. Alors s’ils devaient aller voir le médecin, ou pire encore faire le long trajet pour aller à l’hôpital, c’était parce que la situation était sérieuse, voire grave.
Il a donc grandi avec la crainte de ce que pouvait représenter une visite à l’hôpital. J’ai moi-même eu cette crainte en grandissant et en tant que jeune adulte. La peur qu’une consultation pour un problème simple et routinier se transforme en cauchemar médical, que mon cas soit l’exception à tous les cas similaires facilement guéris, que quelque chose d’autre de sérieux soit diagnostiqué.
Alors je ne suis pas surpris qu’une majorité d’hommes soit réticente à consulter, que ce soit pour un problème d’audition, une douleur persistante et inquiétante, ou pour tout autre signe et symptôme anormal (si les symptômes sont psychologiques, alors cette réticence est encore plus forte). Je crois que cette réticence, qui se traduit en inaction et procrastination, est un comportement appris et transmis (inconsciemment bien sûr) de génération en génération.
À travers mon propre cheminement personnel, où j’ai appris à demander de l’aide et à prendre soin de moi, j’ai pris conscience de l’importance de briser ce schéma inter-générationnel. J’ai compris que consulter sans délai, peu importe le problème, est un facteur clé dans la guérison de bien des problèmes de santé, qui autrement peuvent s’avérer graves s’ils ne sont pas dépistés tôt et laissés à eux-mêmes.
Ce n’est pas facile de se défaire de ses attitudes et comportements acquis. J’admets que je ressens encore parfois cette réticence à consulter, mais je fais des efforts pour « passer par dessus ». Je le fais à la fois pour ma propre santé et également pour montrer l’exemple à mes enfants.
Alors cher papa, que ce soit pour ton ouïe qui fait défaut, ou pour tout autre symptôme que tu pourrais ressentir dans le futur, je t’encourage à consulter sans délai. Parce que je t’aime et que j’ai ton bien-être à cœur.